Campagne électorale 2017 : France et Iran
Je suis la campagne électorale en Iran et je suis la campagne électorale en France. Les deux pays vont élire leurs Présidents, dans les semaines à venir.
Je ne regarde pas les duels de rhétorique entre les candidats, je ne lis pas non plus leur programme. J’écoute, je regarde, je lis et je m’intéresse à ce que pense la population.
Que disent les gens en fait ? La défiance vis-à-vis du politique est généralisée et ce n’est pas en Belgique que nous allons dire le contraire, bousculés par le scandale des intercommunales.
Quelles sont mes conclusions ? Pour moi, les choses sont simples : c’est le système électoral et démocratique actuel qui est à remettre en question et également l’organisation de notre société.
Les gens lisent les programmes des uns et des autres, discutent de l’idéologie des candidats, de leur passé politique et personnel. Aussi bien en Iran qu’en France, j’ai l’impression que la population attend qu’UNE personne vienne la sauver sur son cheval blanc.
Pour moi, ce ne sont pas les élus politiques qui vont faire quelque chose de fondamentalement radical pour nous. Non, c’est à nous de faire quelque chose pour notre monde, notre environnement, nos enfants, notre planète. Il s’agit pour moi d’une responsabilité collective, de l’ensemble de la population, de nous tous, donc.
Pour moi, le système politique actuel ne convient plus à notre monde, au 21ème siècle. Il faut le repenser totalement ; cela relève du bon sens.
Moi, ce que je pense, c’est que tout citoyen doit participer à la vie politique de sa cité, de son quartier, de sa ville, de son pays et du monde. Alors les choses bougeront, changeront. Tant que chacun de nous, oui, je dis bien CHACUN de nous, n’aura pas fait partie du processus de prise de décision, ne se sera pas approprié le devenir de son quartier, de sa ville, de son pays, du monde, rien ne bougera.
Alors commençons par le début. D’abord, qui a dit que tout le monde devait travailler à plein temps ? Ou tout simplement, qui a dit que tout le monde devait travailler ? Je pense personnellement que tout un chacun pourrait parfaitement exercer sa profession à mi-temps pour consacrer le restant de son temps à sa famille, ses amis, ses loisirs et sa cité. Oui, pour moi, il faut beaucoup de temps libre pour pouvoir exercer sa créativité à tous les niveaux. Si nous sommes constamment fatigués, stressés à cause de notre vie professionnelle et familiale tellement chargées, si frénétiques, mais quand donc allons-nous vivre vraiment ? Quand donc allons-nous avoir du temps pour faire fleurir notre créativité, nos réflexions ? Quand donc allons-nous participer à la vie du monde ?
Moi, j’ai été élevée dans une communauté où j’ai appris le fonctionnement de la vie participative, à travers la consultation notamment. J’y ai aussi appris que c’est de la confrontation des idées que naît l’étincelle de la vérité. Donc je sais que les conflits font partie de la vie et sont inévitables. Mais je n’ai pas appris comment les gérer de façon positive ni ce qu'est la communication non violente par exemple, ou comment exprimer mes émotions ou encore m’affirmer de façon bienveillante. Je pense qu’il est grand temps que tout le monde bénéficie aussi de cette éducation à l’école, dès son plus jeune âge : c’est quoi le travail collaboratif ? C’est quoi l’écoute active ? Ça marche comment la démocratie ? Et s’il y a des conflits, on fait comment ?
Il est aussi grand temps de complètement changer le système politique actuel, auquel la population n’adhère plus, tout simplement parce qu’il n’est pas démocratique, parce qu’il ne fait pas participer les citoyens aux décisions qui les concernent et à l’élaboration de leur propre vie, parce qu’il n’est plus adapté à l’humanité d’aujourd’hui.
Selon moi, voici les deux premiers pas à faire dans cette direction :
Tout d’abord, pour que tout un chacun puisse pleinement participer à sa vie et à celle du monde, dans le cadre d’un système véritablement démocratique, il nous faut APPRENDRE des compétences relationnelles, à l’école par exemple. Car enfin, à quoi peut bien servir l’école si nous n’y apprenons pas à résoudre nos conflits de façon positive tout au long de notre vie, à travailler de façon collaborative dans notre profession future, dans la vie de la cité, ou encore à pouvoir exprimer nos émotions à notre futur(e) partenaire de vie ? Voilà pourquoi je pense qu’il est plus que temps que l’éducation émotionnelle fasse partie du programme scolaire général.
Et en second lieu, il faut apporter un changement radical à la répartition entre temps professionnel et temps libre : celle-ci doit être complètement inversée pour que chacun de nous puisse se sentir exister et profiter pleinement de la vie, en participant à la construction non seulement de son propre monde, mais aussi de notre monde à tous. Oui, alors, nous verrons un autre monde émerger, alors seulement : plus de compétences relationnelles, plus de temps pour la créativité, plus de présence authentique à notre vie et au monde.
Azita Rahimpoor
Bruxelles, le 29 avril 2017